N'est-ce point cette sinueuse route de Cuges, traversant moult bois épais et défilés étroits, qui fut le théâtre de ses premiers faits d'armes ? N’est-ce point au château de Fontblanche, tout près d’ici, que, un soir de 1779, il aurait fait irruption au beau milieu d’une réception mondaine, organisée par les dames de Garnier, propriétaires des lieux (4) ? La tradition ne veut-elle pas qu’il ait eu sa table réservée dans l’une des auberges du village, où, bénéficiant de complicités, il puisait ses informations ?
Une tradition qui veut aussi que ce soit autour de Cuges que Gaspard ait caché son fabuleux trésor. Voilà qui en a fait rêver plus d’un ! Rares sont les sites depuis lesquels on peut apercevoir « trois châteaux » qui n’ont pas été fouillés de fond en comble... C’est que, de temps à autre, Robin des Bois laisse la part belle aux héros de Stevenson ou d’Edgar Poe.
Sans doute faut-il prendre également en compte un dernier facteur qui explique que, encore de nos jours, ce personnage romanesque a conservé la sympathie des Provençaux. Les aventures de Gaspard se sont transmises de génération en génération. Les grands-parents les ont contées à des petits-enfants que l’on imagine émerveillés. Ainsi, Gaspard est indissociable des souvenirs d’enfance, ce qui ne peut qu’exalter tout un aspect affectif et émotionnel.
Curieusement, Gaspard de Besse n’apparaît pratiquement jamais dans les documents officiels, si ce n’est bien sûr dans l’acte de sa condamnation à mort. A Cuges, les archives communales ne sont guère plus éloquentes à son sujet. Aucune délibération ne mentionne son nom, ni un quelconque méfait qui puisse lui être attribué. Mais ce silence peut s'expliquer de maintes manières...
Car sa présence autour du village semble avérée : l’acte de condamnation en fait état, et de tous les « crimes » qui lui ont été reprochés, les seuls qu’il ait reconnu sont en effet les vols commis dans les Gorges d’Ollioules, dans le massif de l’Estérel et dans les bois de Cuges.
Et force est de reconnaître que, pour sillonner la Basse-Provence, il a bien fallu qu’il emprunte la seule route qui reliait Marseille à Toulon, celle qui traversait Cuges. Ainsi, bien que les preuves soient minces, nous devrions, sans grand risque d’erreur, pouvoir dire que, à Cuges aussi, Gaspard de Besse est passé… et a sans doute sévi.